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Le blog de JeanM
20 octobre 2007

XX - Les épidémies...

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Les "flageallants"...

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... ou l'apparition de l'Ange Exterminateur, agitant son glaive au milieu de tous, moissonnant des milliers d'hommes de tous rang, de tout âge et de tout sexe. Ainsi, le mot deul de peste inspira-t-il de tous temps l'effroi et l'horreur. De bonne heure, dès le Moyen Age, ce nom devient à la fois une injure et une imprécation, employé comme synonyme de corruption : "Fuyez le péché comme la peste..."; "La volupté est la peste de l'âme...; "L'irréligion est la peste de la société...".

Les épidémies et la peste en particulier ont laissé dans la population une impression beaucoup plus forte que celle produite par les famines. Ces dernières n'ont en effet rien laissé de particulier dans le langage populaire. On savait par expérience que les ravages d'une épidémie seraient plus rapides et plus destructeurs que la famine qui n'arrivait que lentement et à laquelle on avait des chances de pouvoir échapper, pour peu que l'on trouve à se nourrir de n'importe quoi ! Avec la peste, il n'y avait rien a espérer... Elle était comparé à un être mystérieux, invisible, insaisissable, qui vous attaquait traîtreusement, vous terrassait, vous rongeait et vous jetait dans la tombe.

Comment comprendre la consternation et l'effroi de toute une cité dans de telles circonstances ? Devant une médecine impuissante, il ne restait que le recours à la religion pour accepter le fléau comme un châtiment de Dieu ! Mais les hommes ont besoin de "responsables" : on s'en prit aux juifs et souvent aux malades eux-mêmes. La vérité demeure qu'il s'agissait là de prétexte accommodant pour les dépouiller de leurs biens et, en certains lieux, un moyen bien pratique pour battre monnaie...

Il ne faut pas non plus prendre à la lettre les nombres parfois énormes des victimes de chaque épidémie

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Un exemple en terme d'exagération des victimes nous vient des épidémies du XIe siècle, notamment celle de 1008, citée comme la plus violente. A  Anvers, d'après la chronique et ses copistes, moururent 43.000 personnes, à Tournai 20.000, à Bruxelles 25.000, à Louvain 22.000, à Gand 34.000, à Bruges 12.000 et à Cambrai 10.000. Soit 160.000 personnes qui auraient été enlevées par la peste dans une seule année et dans sept villes ! Est-il nécessaire de  dire que ce chiffre est une exagération gratuite et qu'au commencement du XIe s. la population de ces villes était loin de pouvoir fournir un tel contingent de victimes ! Anvers, par exemple, encore enfermée dans  sa première enceinte, ne pouvait guère contenir que 5 à 6000 habitants...

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Il est parfois difficile de connaître avec exactitude  la maladie qui frappe une population donnée, ou encore de savoir si celle-ci a atteint nos régions on non. La terreur, qui ne raisonne pas, a crut souvent apercevoir la peste, là où régnait seulement une autre affection, une contagion locale ou une maladie endémique. On usera donc d'une certaine prudence...

Les plus anciennes observations relatives à l'apparition d'épidémies en Flandre ne remontent pas au-delà du VIe siècle. Mais rien ne prouve vraiment que les épidémies qui frappèrent la France en 540, 618 et 684 ont pu atteindrent nos régions. Le terme de "royaume mérovingien" étant trop vague et plus tard, en 801, la peste qui ravagea l'Allemagne sous le régne de Charlemagne, n'a peut-être jamais dépassé le Rhin...

En terme de chronologie, nous prendrons donc comme point de départ le IXe siècle, plus exactement l'an 834, lors de laquelle une épidémie ravagea le pays wallon. Le chroniqueur qui nous en parle la qualifie de "pestilence", sans plus. La même qualification est donnée à une seconde épidémie qui se  manifesta en 870. Elle aurait été produite par la putréfaction d'une "prodigieuse quantité de sauterelles" et aurait principalement affecté la côte entre Dunkerque et Boulogne.

Le Xe s. présente également deux apparitions de la peste ou qualifiée comme telle, l'une en 927, l'autre en 990. On ne nous dit rien de particulier, sinon qu'elles auraient sévit en Lotharingie qui comprenanit alors une partie de la Belgique. Néanmoins, celle de 990, relaté par Reygersberg, chroniqueur peut-être un peu naïf, fut si grande "que les vivants s'ennuyant d'enterrer les morts, prirent le parti de mourir avec eux" !

De l'an 1006 à l'an 1008, la peste qui se promenait dans la plus grande partie de l'Europe  visita le Brabant et la Flandre. Et on nous dit, pour donner une idée de la mortalité "que l'on ne pouvait trouver assez de vivants pour enterrer les morts !". C'est lors de cette épidémie que 600 gantois serait morts le même jour, à l'apogée de la crise. Seulement voilà, certains rapportent les faits pour l'an 1008, d'autres en 1046 ou 1056...!

En 1026, une nouvelle flambée de peste atteint la Lotharingie. Encore une fois nous ignorons son aire de propagation. Mais 1046 sera une année fatale pour la Flandre et 1056 pour le Hainaut. Cette dernière accablera essentiellement les villes de Mons et de Valenciennes.

Pour 1073, ce n'est pas la peste mais les écrouelles (en latin "scrofa" - truie) qui prit en Flandre un développement effroyable. Comme cette maladie avait aussi atteint la France, ele donna lieu à une légende selon laquelle le roi possédait le don de guérir les écrouelles. On peut se demander si les rois de France étaient assez naïf pour y croire au point que Philippe de Valois en aurait guéris... 1400 ! On sait seulement que la plupart de ceux qui venaient se faire "toucher" étaient des gens du peuple, des mendiants, auxquels on ne manquait jamais de distribuer quelques menus monnaies et qui avaient donc tout intérêt à vanter la vertu miraculeuse du prince pour profiter de ses largesses... Toujours est-il, qu'en Flandre le maladie en  a retenu le nom pompeux de "mal royal" (koningzeer).

Un mal nous quitte qu'un autre arrive... On ne sait pas l'époque précise, mais vers 1080, on observe pour la première fois le célèbre "feu Saint-Antoine", "feu sacré" ou encore "mal des ardents". Il se répand en Flandre et dans le Brabant pendant la période 1082 - 1089. Jamais disent les chroniques, on ne vit en Flandre tant de manchots, de mutilés et d'estropiés !!

On ne sait pas toujours de quoi il s'agit exactement, mais la ville d'Ypres vis périr 3000 personnes en juillet et août 1088, enlevées par une "effrayante mortalité". Cette pestilence atteint ensuite la petite ville de Béthune. mais elle fut rapidement éteinte par l'intervention de St. Eloi... Ouf !

Avant la fin du XIe s. (1094), Maître Bertryn, notaire à Anvers et auteur d'une chronique conservée à la Bibliothèque Royale, à Bruxelles, nous dit que durant deux ans il y eu une peste si effroyable par toute la terre, que beaucoup de schismatiques rentrèrent dans le giron de l'Eglise. Mais ces termes sont très vagues. On rapporte également que durant le XIIe s. une épidémie aurait sévit en Belgique (1125) qui aurait trouvé son origine dans la putréfaction de milliers de poissons gelés pendant un hiver rigoureux...

Finaleement, on ne trouve que deux maladies endémiques, qualifiées de "peste" durant le XIIe siècle : l'une en 1118, où 4000 personens décédent à Ypres; l'autre en 1182 dans la ville de Malines. Ce qui ne veut pas dire que ce XIIe s. fut plus favorisé que les autres, car c'est à cette époque que nous arrive d'Orient un autre fléau : la lèpre !

La lèpre... On la connait depuis la plus haute antiquité. Ceux qui en étaient atteint invoquaient Saint Lazare, qui a laissé sont nom au "Lazaret" à Jérusalem. Son nom servira a désigner la maladie  qu'on appelait indifféremment : lèpre, ladredie, mal Saint-Lazare ou Saint-Ladre et ceux qui en étaient atteint : lépreux, ladres, mésels, mésiaux ou simplement "grands malades". Certains historiens ont signalé l'existence de la lèpre en Europe avant le XIIe siècle, mais on admet généralement que ce sont les croisés qui l'on introduit par propagation dans toute l'Europe.

Au Moyen  Age, c'était un mal hideux, aussi contagieux qu'inguérissable. Devenue l'horreur de la société les ladres sont expulsé de son sein dans l'intérêt général. Est-il besoin d'ajouter que le nombre d'expulsés fut considérable... ? Voyez-les : ils portent un manteau ou une "taratrelle" de bure grise et un large chapeau d'osier. Ils annoncent leur proximité par le tintement d'une clochette et tout le monde fuit à leur approche en leur jetant l'aumône. Ils sont horribles à voir ! Mais la religion veille sur eux. On va donc créer ces asiles particuliers : maladreries, léproseries. Ils étaient desservis par des frères et des soeurs qui suivaient la règle de Saint Augustin.

C'est ainsi que l'on retrouve aujourd'hui, près de la ferme des Hayes, à Luingne, une rue de la Maladrerie... En Flandre, ces "grands malades" étaient aussi appelés "akkerzieken"  et "zieke leiden" (malades des champs ou gens malades). On fait encore mention de 4 contagions, qualifiées de "maladies pestilentielles" :  1214, 1234, 1240 et 1259. On sait seulement que la mortalité causée par celles et 1234 et de 1240 fut si considérable que des centaines de pauvres gens durent être ensevelis dans la même fosse... Restons prudent, il s'agit peut-être d'une hyperbole puisque l'on retrouve souvent le même type de phrase pour exliquer un nombre important de victimes !

Une première "peste" se déclare en Flandre en 1316 (Meyer) vers la fin de la grande famine de l'année précédente. C'est dans son "Brabantsche Yeesten" (Gestes Brabançons) que Jean Boendale la décrit d'une manière simple et brève : "Cette mortalité fondit tout à la fois sur le pauvre et sur le riche; quelque sain et bien portant que l'on fût, nul n'était à l'abri d'une contagion et de la mort; on était très gravement malade et peu de gens en réchappèrent". Il est a noter que Boendale appelle l'épidémie de 1316 comme   étant une "mortalité" (sterfte) et non comme étant la  peste !

On constate alors que la population, stupéfaire par la terreur et voyant la mort moissonner journellement dans tous les rangs de la société, en était devenue indifférente à la conservation de sa propre existence... Chacun s'attendant a être appelé du jour au lendemain à suivre ses proches et ses amis dans la tombe. On raconte qu'à Bruxelles, en cette année fatale, on fut obligé de consacrer plusieurs nouveaux cimetières... On prétend aussi qu'à Tournai, 13.000 personnes furent portées en terre et qu'à Louvain les deux tiers des habitants en seraient morts !

Nous voici donc au XIVe siècles, époque où" l'Ange Exterminateur agita son glaive sur toutes les contrées connues de l'Ancien Monde", selon une formule consacrée de l'époque.

On racontait donc, en ce temps-là que "cette peste commença au royaume de Cathay, par une vapeur de feu horriblement puante qui sortit de terre, consuma plus de deux cent lieues de pays, jusqu'aux arbres et jusqu'aux pierres, et infecta l'air de telle sorte qu'on en voyait tomber des milliers de petits serpenst et autres bêtes venimeuses. Sa malignité était telle que les bubons qu'elle occasionnait, rongeaient et putréfiaent jusqu'aux os, et le venin était si subtil et si contagieux qu'il tuait à la simple vue !"

1348 / 1349 : En Flandre, la peste noire a d'abord éclaté au port de l'Ecluse. A Tournai, l'apparition du fléau fut révélé par le son des cloches annonçant de nombreuses funérailles. Parmi nos villes où sévit la peste noire on cite Valenciennes, Mons, Ypres et Liège. Il faut remarquer que la Chronique de Brabant ne dit rien de la peste noire, bien qu'elle annote le massacre des Juifs auquel cette contagion donna lieu. Les Annales de Bruxelles et d'Anvers n'en parlent pas non plus. Mais c'est alors que l'on voit apparaître la secte des Flagellants, une sorte d'épidémie morale, sur laquelle Jean Boendale et Gilles li Muisis nous ont laissé de longs détails. Elle n'est pas naît en Flandre, mais serait arrivé chez nous par l'Allemagne.

S'il faut en croire l'auteur d'un manuscrit cité par M. Kervyn de Lettenhove, la secte des Flagellants aurait compté plus de huit cent mile prosélytes. Beaucoup d'entre eux résidaient en Flandre, en Hainaut et dans le Brabant "et y avoit, dit le chronique, grand foison de grans hommes et gentils". La ville de Tournai fut le but du pélerinage de ces sectaires dans les Pays Bas. En effet, après l'arrivée des Flagellants de Bruges, on vit successivelent arriver à Tournai ceux de Gand, de l'Ecluse, de Damme, de Nieuport, d'Eecloo, de Cassel, de Deinze, de Dixmude, d'Audenarde, de Lille, de Maubeuge, de Bailleul, de Louvain, de Namur, de Genappe, d'Enghein, de Mons et de Valenciennes. Au total, en moins d'un mois, 3750 Flagellants, y compris une association de 20 femmes, visitèrent Tournai.

Pour protéger de la peste, on invoquait, dès le XIIe s. Saint Sébastien et Saint Eloi. En Flandre et en Hainaut, on honorait plus particuliérement Saint Macaire, évêque d'Antioche. A Anvers et dans les environs, c'était anciennement Saint Grédégand, abbé, dont le corps reposait à Deurne et, dans la Campine, on recourait à Saint Adrien et à Saint Wiilebrord. Mais le plus célèbre de tous les patrons des pestiférés, c'est certainement Saint Roch ! Quelques auteurs prétendent que la peste noire réapparut en 1360. Mais il est certain que l'année précédente déjà il avait régné à Ypres une mortalité qui aurait été élevé, faisant 4000 morts en trois mois.

Dans la "Petite chronique de Brabant", on découvre cette note, avec son laconisme habituel : "Anno 1374 : lors se proménèrent les danseurs". A première vue, on ne voit pas que ces promeneurs soient atteint d'un mal quelconque, au point que des centaines d'individus en souffrent ! En ce temps-là, certaines personnes ont d'abord cru que les "dansomanes" de l'an 1374 formaient une secte, comme celle qui fit irrumtion à Anvers en 1004... En fait,il s'agissait de la "danse de saint Weith" ou  de "saint Guy".

En matière d'épidémie et tout particulièrement de la peste, la Flandre semble bien lui avoir payé un lourd tribut. Une nouvelle épidémie prend naisance dans la ville de Courtrai, en 1409, d'où elle s'étend dans tous les environs. A Tournai, elle aurait sévi avec une violence particulière. On prétend en effet qu'on ne pouvait plus y trouver un prêtre pour célébrer le service divin, ni même pour remplir les bénéfices devenus vacants. Mais il se pourrait bien que cet état de chose ne soit pas la cause de la peste, mais plutôt la faute du grand schisme d'Occident qui troublait alors l'Europe. Donc cette épidémie serait un mal local tout comme celle de 1424 à Anvers. Entretemps, et à vingt ans d'intervalle, Paris avait déjà été visité deux fois par la peste : 1418 et 1438. Et à chaque fois le fléau avait fait de très nombreuses vcitimes. Cette peste de 1438 se propagea jusqu'en Flandre et à Dixmude notamment où elle sévit là aussi avec une violence extrême : 86 maisons restèrent habitées, les autres étaient abandonnées ou envahis par les... loups ! D'où le nom de "Wolvendyk" (chaussée des loups) que porte encore une rue de cette ville.

Mais comme le dit Gramaye : "On finissait par s'habituer au danger et à  la mort de leurs proches, le trépas horrible qui les menaçait eux-mêmes, ne les empêchait pas de se livrer avec une sorte de frénésie aux bruyants plaisirs de la "ducasse"". Les comptes de certaines communes en donnent d'amples détails, mais ne s'occupe pas plus de la peste que si c'était une chose tout à fait naturelle. On rencontre la même insoucience partout et la fondation d'hospices pour les pestiférés indique seulement la sollicitude des âmes charitables pour l'humanité souffrante.

Dans ce contexte il n'est pas étonnant que des charlatans s'en soient mêlés... Le 9 août 1468, on se saisit à Dixmude de trois individus qui se diaient inventeurs d'un remède contre la peste. L'un d'eux, Guillaume Matthys, dit "Scheur-Capproen", avait entrepris de soigner deux filles atteintes de ce fléau; malheureusement, le remède leur avait donné la mort et le coupable dut payer cette bévue de sa vie : il fut décapité et ses deux complices subirent quelques jours plus tard le même supplice. Mais l'exemple ne servit pas à grand chose : charlatans et empiriques continuent à infester la société.

Le notaire Bertryn, d'Anvers nous rapporte l'épidémie qui régna en cette ville en 1487. Mais on ne sait pas s'il s'agissait effectivement de la peste.. Mais la contagion a encore sévit dans les années 1488 et 1489. Il est vrai qu'il règne une certaine confusion de date, de même qu'en ce qui concerne les chiffres des victimes. Un point semble cependant certain : c'est en 1489 que l'épidémie atteignit son plus haut degré d'intensité et que la ville de Bruxelles lui paya le tribut le plus large.

De 1514 à 1516, dautres maladies décimèrent la Zélande, le Tournésis, le Hainaut, les environs d'Ypres et surtout la ville de Valenciennes où aucune maison ne fut épargée. Celle de Mons en souffrit moins, mais de terribles épreuves l'attendait en 1530. Des religieux du tiers-ordre de Saint François étaient venus s'y établir dix ans plus tôt et le Magistrat les avait admis à la condition de soigner et enterrer les pestiférés : ce fut en 1530 que ces religieux eurent l'occasion de signaler leur zèle et leur dévoument. Excepté un seul, tous moururent de la peste...

Une autre épidémie effroyable atteint l'Europe : la "suette" (Responsable autrefois d'épidémies meurtrières, la suette est une maladie actuellement très rare et encore mal connue. Si le tableau clinique est très caractéristique, on ignore tout encore de sa cause et de son épidémiologie ). Elle fait une permière apparition en Angleterre, en 1483. Elle y reparut encore à quatre reprises : 1485, 1506, 1528 et 1551 et toujours en été. Ce fut en 1529 qu'elle fit irruption sur le continent par Hambourg, puis en Belgique, en France, en Hollande, en Norvège et au Danemark.  Septembre 1526, elle éclate à Anvers. Les esprits sont frappés d'une consterantion générale : les médecins et les magistrats sont pris au dépourvu devant cette épidémie meurtrière qui leur ôta la faculté de réfléchir, tant elle fut rapide. Les décès auraient été de 500 en trois jours.  Elle sévit également à Malines, Bruxelles, Gand et Mons où elle décima les populations avant de disparaître au bout de quelques jours.

La peste elle-même poursuit ses ravages. En 1555, elle était en quelque sorte en permanence dans les quartiers pauvres de Bruxelles. Comme la peste avait pour auxiliaire la famine, rien d'étonnant que ses effets demeurent considérables... Il paraît qu'au commencement de 1556, le fléau avait notablement diminué, puisque Philippe II vînt présider le seul chapitre de la Toison d'Or qui se soit tenu dans la ville d'Anvers. Mais en 1557, elle est à nouveau à Thourout, en Flandre et à Meerhout,en Campine. En 1564, elle ravage Namur et s'introduit dans Liège. De 1571 à 1580, le fléau réapparaît chaque année. Dès juin 1571, la maladie est à Bois-le-Duc et à Thourout. Elle enlève de 20 à 30 personnes par jour puis se répand dans tout le Brabant. C'est vers le mois de mai que la contagion se déclare dans quelques maisons de Gand et le tour de Bruxelles arrive en 1578, au milieu des guerres et des désordres toujours croisants de cette époque... Une ordonnace du Magistrat d'Anvers,en l'an 1580, nous donne la certitude que les charlatans sévissaient toujours...

Pour en terminer avec le XVIe s. et comme preuve de la persistance des épidémies, le synode tenu à Cambrai, en 1586, jugea utile de prescrire la nomination de chapelains pour les pestiférés et cela dans toutes les commmunes des diocèses belges !

On est loin d'avoir la preuve que toutes ces épidémies soient effectivement dû à la peste. Nombres de villes avaient, depuis longtemps, prisent des dispositions sous forme de réglements communaux, sans toujours beaucoup d'efficacité... A Anvers par exemple, une ordonnace de 1606 interdit la vente de choux blancs, de fruits gâtés, de prunes, de cerises, tous aliments qui, dans certaines circonstances prédisposent, non à la peste, mais à la... dyssentrie. Il est vrai que l'on considérait alors cette dernière comme étant contagieuse et c'est sans doute pourquoi l'on maintint l'ordonnance durant quatre années ! Une autre épidémie de dyssenterie se déclare en 1615 / 1616. En 1617, on prend ses précautions un peu partout : à Anvers, dans la Campine, dans le Brabant; à Tournai, à Lille et à Audenarde. En 1619 et 1622, on constate la dyssenterie dans la Campine et le Limbourg. La vente de vin est interdite à Anvers. D'autres mesures sont prisent à l'annonce d'une "maladie subite" qui décimait depuis 1623 diverses villes des pays voisins, notamment Paris, Liège, Maastricht, Leyde et Amsterdam.

L'année 1625, la contagion eut une autre cause et un autre caractère. Ou pour mieux dire, l'épidémie ordinaire fut accompagnée d'une seconde. La geurre entre l'Espagne et la Hollande bat son plein et le comte de Mansfeld, au service des Provinces-Unies, avait amené d'Angleterre un corps considérable de troupe afin de renforcer l'armée hollandaise et l'aider à débloquer la ville de Bréda. Disons simplement qu'il s'agissait de bandes racolées dans la populace anglaise... D'où une épidémie connue sous le nom de "mal de Mansfeld". Mais une autre épidémie, dont on ne connaît pas la nature frappe encore et notamment à Thurhout. Le corps échevinal s'était sauvé de la ville et un vieux narrateur ajoute que "les ronces croissaient dans les rues inhabitées...". Anvers est atteinte en 1626. Bruxelles et Ypres en 1627.

Et comme nous sommes toujours en période de guerre, avec l'envahissement du Brabant par les Hollandais et les Français,on accuse ces derniers d'être la cause des épidémies parce que l'on enterrait pas les cadavres d'hommes et d'animaux que l'ennemi abandonnait dans sa retraite et dont toutes les routes étaient jonchées.

Arrive la paix de Westphalie conclue en 1648. C'est ici que se place une contagion dont les historiens de Bruxelles ne parlent pas ou peu alors qu'elle ait faite de nombreuses victimes. D'après les mesures sanitaires et le rapport qui en résulta, il y avait, à Bruxelles le 5 octobre 1651 : 213 maisons infectées, dont 55 avaient dû être purifiées (?). Il dut y avoir de nombreux malades puisqu'on nous apprend la construction d'hôpitaux supplémentaires. Après une légère reprise en 1652, elle disparue complétement durant l'été. L'année 1667, c'est peut-être bien la peste qui se présente à Bruxelles,en ce 20 octobre, dont le premier cas se déclara ruelle de la Tête. Aussitôt la terreur se répand dans la ville alors que la maladie a une  prédilection pour les ruelles de la ville basse . Elle durera deux ans, du 20 octobre 1667 à novembre 1669. Le 29 décembre suivant, cet heureux événement fut célébré par la sonnerie du beffrois et un"Te Deum" solennel. Un relevé officiel fait état de 4046 décès. En 1666, la peste se manifeste aussi à Bruges où une centaines de maisons étaient encore infectées en 1669.

Notons qu'en 1678, une "peste" (?) dépeupla 1200 maisons à Anvers en moins de trois mois, ce qui ferait supposer entre 5 et 6000 décès. On la surnomma le "mal d'Anvers". Signalons aussi une contagion à Ypres, ville si souvent éprouvée.

Si une chose nous a été fatale c'est bien cette politique des traités de paix conclu après des guerres interminables, dont tout le XVIIe s. est rempli et tout cela pour s'approprier une toute petite partie du vaste territoire de Charles-Quint que l'Espagne ne pouvait plus défendre... Les traités de Munster,en 1648; des Pyrénées, en 1659; d'Aix-la-Chapelle, en 1668; de Nimégue, en 1678 et de Ryswyck, en 1697 ne furent que des occasions pour pressurer,morceler et démembrer la Flandre ! A chaque traité, nous avons perdu quelque lambeau de province, quelque lisière de nos frontières. Nous avons perdu (on nous a volé...) la partie septemtrionale de la Flandre et du Brabant,la ligne de la Meuse dans le Limbourg; l'Artois, le Cambrésis, la Flandre française, plusieurs places dans le Hainaut, le Namurois et le Luxembourg. Et, pour comble, nous devons subir la fermeture de l'Escaut et de la Meuse et se résigner à l'anéantissement et à la confiscation du commerce d'Anvers au profit exclusif des Hollandais...

Après tant de revers et de calamités, après tant de ravages par la politique et la guerre, la famine, la peste, ce pays rogné, déchiré, dépeuplé, affaibli et appauvrie, mais patient, avait au moins le droit d'espérer que les temps était venue... ! C'est avec la grave crise alimentaire des années 1698 - 99 que s'ouvre le XVIIIe s., avec la guerre de succession d'Espagne, l'ombre menaçante du Roi-Soleil et la  jalousie calculée des Hollandais.

Si la peste semblait ne plus suivre les armées, c'est sans doute que l'on prenait dorénavant soin d'enterrer les morts... Mais ce sont les épidémies de dyssenterie qui se manifestent dans différents points de nos provinces avec plus ou moins d'intensité :  en 1702 et en 1705, en Campine. En 1740, à Anvers, parmi les troupes alliées qui l'occupaient. De 1741 à 1746, elle jette la stupeur en Campine où elle vide totalement plusieurs villages. En 1779, elle frappe le Hainaut. Quant à la grippe, on en signale quatre apparitions dans le cours du XVIIIe s. : 1729, 1733, 1740 et 1743. On l'appelait "influenza" et elle n'était pas encore considérée par le vulgaire comme le prélude d'une autre épidémie infiniment plus meurtrière...

La contagion qui inspira le plus de frayeur, ce fut la variole ou "petite vérole".

Indépendamment de ce qu'elle est éminemment contagieuse, ce qui la rendait déjà fort redoutable, elle avait le plus souvent un dénouement fatal; car quand elle ne jetait pas ses victimes dans la tombe, elle les défigurait pour la vie, soit en leur ravissant la vue ou l'ouïe, soit en leur labourant la figure de cicatrices nombreuses, profondes et ineffaçables. Rien de moins rare en ce temps que de se trouver dans une foule nez à nez avec une face stigmatisée par la variole. Détruisant la beauté, cette maladie était naturellement l'ennemie jurée de la mode. Les petits-maîtres, les incroyables, les merveilleuses, les lions et les lionnes l'exécraient à l'égal de la lèpre et peut-être plus que la peste.

Selon certains, elle serait originaire d'Ethiopie et serait paru une première fois chez les Arabes, d'où les Maures, qui envahirent l'Espagne et la Sicile au VIIIe s. la trasplantèrent en Europe. Au Xe s. elle avait fait son entrée en Flandre, car Iperius, cité par Du Cange, nous apprend que Baudouin, fils du comte Arnould Ier, mourut d'une maladie que les médecins appelait variole ou "poques".

Alors que la lèpre était son son déclin, la petite vérole devint le fléau et la désolation des familles. Mais il y eu Lady Montague, dans les anées 1720 et enfin le duc d'Orléans en 1756 pour populariser  l'inoculation contre la variole. Malheureusement la Belgique se montre très réservé, imaginant qu'il ne pouvait en résulter qu'une épidémie contagieuse. A tel point qu'à Anvers, à la fin de ce siècle, il n'y avait que quatre médecins  qui pratiquaient l'inoculation. Uniquement chez les personnes des hautes classes de la société... Jenner proclamera sa découverte en 1798 ! Ce sera le docteur Demanet, de Gand, qui vaccinera le premier un enfant belge, le 7 septembre 1800. Cela étant, des documents officiels nous apprennent qu'en 1849, près de 8000 cas de petites véroles ont été observés et que plus de 700 enfants ont été victimes de cette maladie.

Nous voilà délivré de trois fléaux : la lèpre s'est éteinte, la peste est bannie du continent et la variole peut être évitée... et certains présomptueux commencent à affirmer qu'aucune contagion n'est plus à redouter !Ils se reposent en cela sur les cordons sanitaires, les quarantaines et les mesures de police : ils raisonnent comme ces autres philanthropes qui soutenaient qu'avec la pomme de terre, les famines étaient désormais impossible !

Dans les communes rurales, comme la nôtre, l'incurie et l'inconscience étaient poussés assez loin. Ici aucun réglement pour les constructions et les alignements : des tas de fumeirs, des mares croupissantes jusque près des maisons. Dans les villages, quelques bouts de pavages remplis de cassis et aux alentours des chemins défoncés, impraticables pendant près de la moitié de l'année. Herseaux était dans cette situation...

Maintenant, on peut peut-être s'étonner que les épidémies restèrent fort rares de 1801 à 1815, durant l'occupation française. Néanmoins, on observait chaque année des cas plus ou moins nombreux de fièvres typhoïdes, de dysenterie, de rougeole, de scarlatine; la variole reparaissait souvent avec intensité malgré le vaccin. Mais dans l'ensemble ni plus ni moins que par le passé dans  les villages bordant l'Escaut ou comme notre quartier barbotant encore dans ce qui devait subsister de mares et de  ruisseaux dépendant de l'Espierres.

C'est de Russie que nous parvint la première alerte. On y suivait avec anxiété la marche et les progrés d'une épidémie mystérieuse, dont on avait qu'une idée confuse à laquelle la distance donnait des proportion terrible. Bientôt on appris que le choléra, après avoir décimé les armées russes en Pologne avait franchi les cordons sanitaires que l'Autriche et la Prusse avait tenté de lui opposer. Les correspondances n'arrivèrent plus de ces contrées, sauf si on les passées au chlore que l'on prônait comme désinfectant... Le choléra aborde la France par l'est et l'ouest. Les chiffres des décès vont de 1200 à 1800 morts quotidien à Paris !

Chez nous elle débute exactement le 25 avril 1832 à Vaulx, près de Tournai. Quatre jours plus tard il se montre, en même temps à Courtrai et à Wetteren. Le mois suivant il est à Gand, Furnes, St.-Ghislain, Péruwelz... En juin, en province d'Anvers et de Brabant et en août dans le Limbourg où il s'éteint. L'hiver arrête la marche de la maladie et ce n'est qu'en juillet 1883 qu'elle reparaît en Flandre orientale, mais aussi à Liège et à Anvers. Elle disparaît à nouveau à l'approche de l'hiver, pour ne plus se montrer, en 1884, que dans une commune du Brabant et dans cinq de Flandre, parmi lesquelles la ville de Gand qui fut ainsi visité trois fois ! Au total,il semble qu'elle ai emprté dans cette première invasion, environ 8000 personnes, à part égales des deux sexes mais plus de la moitié dans les villes

Et a chaque accalmie, le monde est ainsi , il se rencontra des gens pour rêver que l'âge d'or pouvait bien revenir, comme au bon vieux temps, avec la livre de beurre à une plaquette et celle du pain à un sou... !

Survient alors le typhus... Encore une fois on accusera les petites communes avec leurs habitations dans les lieux humides, les tas de fumier et le voisinage des eaux stagnantes, des mares bourbeuses. Dans les villes, l'encombrement de familles pauvres dans des demeures basses, étroites, mal éclairées, étroites, mal aérées. Une alimentation malsaine ou insuffisante...

Pendant les années qui s'écoulèrent de 1840 à 1850, le typhus connu deux périodes en Belgique : la première, que l'on appellera "normale" présente un total de 95 épidémies dans autant de communes. Excepté la province d'Anvers. On signale 6500 cas de maladie dont près de 800 se terminèrent par la mort.

La seconde se place immédiatement après la crise alimentaire survenue à la suite de la déterrioration de la pomme de terre et du seigle. Les misères et les privations conduisirent, en 1846-48 à une effrayante épidémie de typhus qui désola tout le pays. Dès janvier 1846 elle est présente en Flandre qui se trouve déjà dans une situation épouvantable : crise linière, cherté et mauvaise qualité de la pomme de terre, renchérissement des denrées alimentaire  de base. A la fin de l'année, la maladie avait atteint plus de cent communes, mais occationnée peu de décès. En 1847, l'épidémie atteint cette fois toutes les provinces, tout en se maintenant à divers degrès dans la plupart des localités où elle avait été présente l'année précédente. L'extension vient encore une fois des campages de Flandre et,en 1848, ce sont encore une quarantaine de communes qui sont atteintes pour la première fois. En juillet, l'épidémie avait pour ainsi dire disparue... On atteste, pour les communes rurales, 70.000 personnes atteintes du typhus, dont près de 13.000 moururent. Pour les villes, ce sont Bruges, Gand, Courtrai, Thielt et Bruxelles qui connurent le plus de victimes

A SUIVRE...

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