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Le blog de JeanM
12 novembre 2007

4.7 - Notes : les Temps d la faim - 2

Les abbayes, dans les campagnes, étaient journellement assaillies par la foule affamée, et les abbés, souvent à bout de ressourses pour la contenter, avaient recours à des expédients. Eylardus, abbé des Bernardins d'Adewert, près de Groningue, fit confectionner une marmite monstre, dans laquelle on prépara tous les jours le repas de trois cent pauvres : ce chaudron a été longtemps conservé dans un hospice de cette même localité. Un autre souvenir se voyait jadis dans l'église de Saint Pierre, à Leyde : c'était un pain pétrifié. Voici comment la tradition en explique l'origine : une femme avait reçu à la porte d'un couvent un pain d'orge, et désirant le garder pour elle seule, elle affirma, sous serment, à sa soeur qui lui en demandait une part, qu'elle n'avait pas de pain dans toute la maison, ajoutant que, si elle mentait, il fût changé en pierre, ce qui fut faut.

Dans la suite du XIVe s., la  Flandre ne fut plus si durement touchées. Il y eu cependant quelques crises alimentaires, notament en 1343, 1351, 1361 et 1363? Résultat : le prix des grains ne cesse de monter au point que le pain sera une denrée plus chère que la viande ! Si l'on se reporte aux chroniques, le XIVe s. aurait connu 20 années de famine...

Au XVe s., la première qui se présente en Flandre est celle de 1409 : elle ne durera pas, beaucoup de navire du Nord ayant importé des grains. Nous verrons d'ailleurs que cette importation était indispensable, ce qui nous amène à conclure que le pays ne produisait pas assez de blé pour subvenir aux besoins de la population. Les années 1429, 1431, 1432 et 1433 seront également annotés comme années de disette; la première et la dernière pour la Frise, les deux autres pour les Flandres et le Brabant. pendant les mois de mars, avril et mai,le vent était invariablement à l'est et au nord-est; la nuit le ciel était serein, mais le jour, le temps devenait couvert et nébuleux, sans qu'il pleuve. La gelée se maintint jusqu'au commencement de juin et letemps restera froid jusque la fin de ce mois. Le soleil n'apparut que le 30 juin. Il se mit ensuite à pleuvoir, de sorte que tous les grains arrivèrent à maturité.

On l'imagine à peine, mais durant tous ces siècles, les temps d'abondance furent rares... Si l'on en croit les historiens, de quelques spécialistés qu'ils soient, les XIIe et XIIIe siécles auraient été favorisés par un climat sensiblement plus doux que le nôtre... C'est vrai, mais le climat n'est pas chose linéaire, ce que cette étude démontre parfaitement. Mais les effets du climat peuvent aussi être indirect... On sait que de grandes inondations bouleversent les provinces septentrionales. Avec la hausse du prix du ble, on attend donc avec impatience l'arrivée des navires du Nord. Et on apprend que toute la flotte a été prise !! Il s'ensuit un malaise général d'où des troubles et des pillages. Et c'est bientôt une véritable famine qui sévira pendant presque quatre années, de 1437 à 1440. C'est dans ces années-là qu'on observe à Bruges des malheureux obligés de se contenter des tourteaux que l'on mêle habituellement à la nourriture des vaches.

Si les détails fourni par les chroniques contemporaine sont exacts, certaines localités ont dû être durement touchés : Roulers aurait été tellement dépeuplée que les loups habitaient les maisons vides (?). Galliot affirme qu'à Namur, environ 8.000 personnes seraient mortes de faim. A Namur toujours, une dame charitable organise une distribution de pain devant la porte d'un couvent : les indigents accourent en masse tellement compactes que 18 personnes furent étouffés par la foule. On rapporte aussi l'exécution d'une femme, à Abbeville, dans la Somme : elle était accusée d'avoir assassinée de jeunes enfants et d'en avoir salé et vendu les chairs ! Elle fut brûlée vive en place publique.

En 1440, c'est la fin de la crise alimentaire et les blès reviennent à un prix plus normal. Cependant, il existe sur l'époque de nombreux bruits tendant à prouver que la longue durée de la famine serait essentiellement dû à des spéculations auxquelles Anvers ne serait pas étrangère...

Suivent quarante années... d'abondance !!

Néanmoins, revenons à Anvers où   il se passent des choses bizarres. Bertryn, dans ses Chroniques, nous dit : "Anno 1480, le 11 août, on ne trouva plus de pain en vente à Anvers; ce fut la troisième ou la quatrième fois... " Apparemment, on ignore ce qui a pu se passer dans une ville aussi commerçante et quelle en fut la durée, mais ce qui est sûr, c'est que l'année suivante le Magistrat se trouva dans l'obligation d'acheter du blé pour approvisionner la ville...

Les autres disettes du XVe s. sont toutes locales : 1481 dans le namurois; 1482 en Flandre; 1490 en Hollande; 1491 en Brabant et en Flandre et 1492 dans les provinces de Frise et d'Overyssel.

Maintenant,l'expérience démontre que toutes ces appréciations ne sont pas exactes. Dans tout ce qui précède, on relève,comme causes essentielles les années de guerres, la dévastation des champs, les excès de froid ou de chaud, l'humidité, les gelées, les orages,les inondations, les grêles, etc... Ne pas oublier les épizooties, les maladies des céréales et la pullulation de certains insectes.

Reste toutes les causes qui doivent être imputés aux gouvernements, aux frivolités politiques, à toutes les causes qui permettent de dévaster un pays tout entiers, les mesures fiscales, tout ce qui entrave la libre circulation des grains. Sans oublier les spéculateurs...

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2

Lorsque le pain entre dans la consommation usuelle du peuple, le blè devient graduellement la base principale de l'alimentation. Dans le même temps, c'est toute une branche commerciale qui se développe au point de devenir une industrie à part entière qui va du champs à la table en passant , sur le plan local, par le  paysan et le  menier. Mais qui deviendra également  un commerce "au long court" à travers toute l'Europe du Nord et motif à de nombreux trafics et spéculations frauduleuses. Car les défrichements peuvent bien augmenter en nombre et en étendues, la production est loin de suffire aux besoins du pays. On en connaît la cause : une population en augmentation constante depuis le XIe s. D'où la nécessité d'importer de Scandinavie un supplément annuel de blé. Au XIIe s. déjà, la Flandre importait des grains du Nord. Au XVe s., ces importations ont devenues un besoin vital. Si elles font défaut,comme cela se produisit en 1438, c'est la famine certaine. Et( c'est unnfait qui se reproduira,comme on le verra plus loin.

Reste la question de la dévaluation de la monnaie. Pour bien faire comprendre ce mécanisme, il faut le simplifier quelque peu. Donc, nous dirons que sous Charlemagne le sou était la vingtième partie d'une livre pesant d'argent. Mais, depuis le XIe s., ce pesant n'était plus d'argent fin :des alliages de cuivre en avaient peu à peu altéré la valeur. Le prix des grains a, pendant ce temps, toujours augmenté : une mesure de froment (en mesure "déterminée") coûtait en France, au début du XIIIe s., un sou; à la fin du XIVe s., trois; et à la fin du XVe s., six à sept (en temps normal). Entre temps, l'altération des monnaies en arrive à un point tel que vers le milieu du XVIe s. le denier (douzième partie du sou), également d'argent pur à l'origine n'était plus fait  que de cuivre pur. On connaît évidemment les répercussions malheureuse qu'aura la découvertes des Amériques : une diminution considérable de la valeur de l'or et de l'argent et, par contre-coup, celui de la monnaie ! A tel point qu'à la fin du règne de Charles-Quint, le prix des grains sera monté au double de ce qu'il était au début du XVIe siècle !!

Arrive l'année 1501 ! Là, tout le monde est d'accord pour proclamer cette année comme la perle des années prospères et heureuses. Qu'on en juge par quelques extraits des chroniques locales : en Zélande, on achetait un seizième de muid, une oie grasse, une livre de beurre et une cruche de vin de pitance pour six sous. A Amsterdam,on donnait pour sept sous, un muid de froment, une jeune oie, une mesure de beurre, un pain de seigle et un pot de vin du Rhin. Enfin, à Alkmar, on pouvait se procurer une vache pour cinq florins du Rhin et un veau pôur onze deniers. Pour la Flandre, les preuves manquent... En tout cas, quatre ans plus tard dans une chronique citée dans "Histoire d'Anvers" (soit en 1504), il arriva une si grande quantité de grains (évaluée à 13.000 veertels) que l'on fut obligé d'en exporter une partie. L'abondance semble être telle que le chroniqueur ajoute que l'on pouvait acheter pour deux "blancs" (pièces de trois liards) douze livres de pain, un pot de vin d'Espagne, un cabillaud, une livre de sucre et ving-cinq oranges.

L'année 1519, même si elle n'égale pas les précédentes, est cependant très favorable : à Anvers, la rasière de fromant coûte douze sous et celle de seigle neuf sous. Et l'on profitera de ces temps heureux pour publier les premiers édits contre les mendiants. Ce sujet particulier sera traité dans un autre chapitre. Mais c'est à cette époque que certaines localités prendront des dispositions légales en y introduisant l'article suivant : "Tout individu surpris et arrêté en flagrant délit de mendicité sera cloué au pilori et y restera exposé jusqu'à ce qu'il parvienne à s'en détacher; après quoi il sera banni à perpétuité de la contré". Sans commentaire...

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